Maintenant ou jamais

Maintenant ou jamais

Ashlynn est rentrée avec le Joker et les autres loups dans un silence de mort. Malgré le fait qu’il y a eu un accord sur le fait qu’elle ne devait pas être « abimée », elle est persuadée que le Joker ne respectera pas cette parole. Pourtant, il n’y a pas le moindre coup fourré, seulement un ton froid plein de promesse pour un futur plus ou moins proche. C’est étrange pour elle cette ambiance pesante, à croire qu’il va se passer quelque chose sans que ce ne soit le cas. Ça a même été compliqué de se concentrer sur la petite cérémonie pour la mort des deux loups. Elle est incapable de savoir comment se positionner face à ces morts, il y a un mélange de culpabilité et de soulagement en même temps. Ce qu’elle se garde bien de dire.

Puis le temps s’est figé quand une guerre s’est déclarée à Londres. La meute n’est pas intervenue, elle n’avait aucune raison de le faire. Ashlynn est même certaine que le Bêta et l’Alpha espèrent le plus de morts possibles côté loup pour pouvoir venir s’installer à Londres et prendre le contrôle d’une partie de la ville. Personne n’avait imaginé que la guerre prendrait fin avec une intervention humaine et que des nouvelles règles se mettraient en place dans la ville. Le temps est resté figé encore quelques jours, le temps de voir comment les choses évoluent et comment agir en conséquence.


C’est à cause d’un énième cauchemar qu’Ashlynn se réveille en sursaut. Elle sait que rien n’était réel et pourtant, toutes les nuits, elle se réveille en sueur avec l’impression d’étouffer dans des abysses sans fin. Inspirant profondément c’est sous une douche qu’elle file pour se calmer et faire fuir cette sensation flippante de son esprit. La première fois que ça lui était arrivée, Ashlynn avait réussi à se calmer en restant longtemps sous l’eau bouillante mais quand la température avait commencé à baisser, c’est la panique qui était revenue. Depuis, elle ne reste pas longtemps sous l’eau chaude pour éviter d’avoir à nouveau cette sensation de froideur sur elle. Il y a des expériences qui marquent plus que d’autres et il semble que l’eau froide ne sera plus jamais perçue de la même manière pour la chamane.

C’est dans sa chambre qu’elle reste enfermée. Elle y passe beaucoup de temps ces derniers jours pour réfléchir à une façon de sortir d’ici avec Liam. Les projets évoqués par le Joker sont loin de lui convenir. Comment ça pourrait être le cas ? Alors il faut bien qu’ils partent d’ici, mais elle ne sait toujours pas comment. La porte de sa chambre s’ouvre brusquement créant un sursaut chez la chamane et un rythme cardiaque qui ne se calme pas en voyant le visage du Joker. « Bois ça ! » C’est une fiole qu’il lui balance et qu’elle rattrape par exemple avant de lui demander ce que c’est. « A ton avis ? C’est une petite aide pour ton rendez-vous de demain soir. » Il n’allait quand même pas demander à la chamane de faire un élixir de fertilité, elle l’aurait fait foirer sciemment. Ashlynn essaie de prendre sur elle en prenant une grande inspiration. « Non ! »

La réaction est immédiate. Ashlynn se retrouve violemment plaquée contre un mur, la main du Joker entourant sa gorge sans pour autant serrer fort. Il faut croire qu’il a acquit le fait qu’elle ne devait pas avoir la moindre marque au cas où elle devrait aller voir Alekseï. « Alors écoute-moi bien. Non seulement tu vas boire ce truc mais, en plus, tu vas faire en sorte que ça se passe bien demain soir. » Le regard qu’elle lui lance est presque moqueur. Il peut lui imposer beaucoup de choses mais sûrement pas de sauter de joie à l’idée de ce rendez-vous arrangé. Sauf qu’elle commence à se dire que ça sent le roussi quand le Joker répond par un sourire trop victorieux à son goût. « Si tu fais tout ça alors peut-être… Peut-être que j’arrêterais le combat à mort de Liam prévu dans trois jours. » Ce n’est pas son attention mais elle n’a pas besoin de le savoir. Il se délecte même de la manière dont les traits d’Ashlynn se décomposent à cette annonce. Elle sait que trop bien ce que ça veut dire, Liam avait été assez clair sur sa position concernant les combats à mort : il ne prendra pas de vie.

Le joker la relâche et lui tend à nouveau la fiole. « Ton choix. » Tu parles d’un choix ! Elle le déteste, bien plus que le goût infecte de ce liquide qu’elle boit et encore plus que le sourire qu’il peut avoir à cet instant. L’élixir bu, c’est le Joker qu’elle contourne rapidement pour sortir de sa chambre et courir dans toute la ferme à la recherche de Liam. Le Joker doit bien la laisser chercher une bonne demi-heure avant de retourner la voir pour lui dire que le louveteau est en permission et qu’elle ne risque pas de le trouver. Ashlynn passe le reste de l’après-midi à cogiter sur un plan. Il n’est plus question d’un hypothétique départ, c’est devenu vital. Elle songe forcément à son père et déteste cette impression de devoir choisir entre lui et Liam. Ce choix, elle n’a jamais voulu le faire mais la menace sur Liam est bien trop concrète pour qu’elle continue d’éviter de choisir.

En fin de journée, alors qu’elle est isolée et qu’elle s’est assurée de se rendre inaudible pour les autres loups à l’aide de magie, c’est un appel qu’elle passe. Maintenant, elle ne peut qu’attendre en croisant les doigts pour que les choses se déroulent comme elle l’a imaginé…


Les nouvelles règles à Londres n’ont pas que des mauvais côtés. C’est grâce à cela qu’elle a pu passer un coup de fil anonyme pour faire un signalement sur un regroupement de loups hostiles aux abords de la ville. Un appel qui ne sera peut-être pas pris avec assez de sérieux mais si, au moins, ils pouvaient envoyer quelques personnes pour vérifier. C’est dans sa chambre qu’elle regarde les heures défilées en espérant du mouvement et elle commence à perdre espoir jusqu’à ce que ça s’agite dans la ferme. Les loups ont senti une présence en approche et beaucoup d’entre-deux se mettent sur le qui-vive pour riposter. Elle ne le sait pas encore mais les militaires se sont contentés d’envoyer une ou deux unités de reconnaissance qui n’auront pas été assez discret. Ça ne mettra pas un terme à cette meute, loin de là. Mais, en attendant, le bêta a déjà constitué une équipe pour aller s’occuper des ces intrus bien trop proches de la ferme.

Pour la deuxième fois aujourd’hui, Ashlynn quitte sa chambre en courant, zigzague entre les loups restés à la ferme au cas où des militaires arriveraient à venir jusqu’ici. Dans la cohue, elle arrive à trouver Liam du regard et c’est vers lui qu’elle se dirige avant de lui attraper la main et de s’enfermer dans la grange. « Je ne suis pas certaine qu’on ait beaucoup de temps. » Surtout si les militaires sont peu nombreux. « Mais il faut qu’on parte. » Le changement doit paraitre un peu radicale, elle qui ne se mettait que trop rarement dans les plans d’évasion de Liam. Sans parler de ce rendez-vous prévu par le Joker, elle a acquis le fait que Liam refusera de partir si elle ne le suit pas et c’est bien pour cette raison qu’elle est en train de lui proposer une évasion à deux. « Genre, maintenant. Parce qu’il est hors de question que tu ailles jusqu’à ce combat Liam. » Elle refuse de le voir perdre la vie, refuse de le perdre sans rien avoir tenté contre ça. Le plan n’est pas parfait, elle ne sait même pas où ils peuvent aller mais ils n’ont pas le choix : ils doivent essayer.

Maintenant ou jamais

« Liam ! Je viens de te dire qu’on n’avait pas beaucoup de temps ! » Alors, s’il te plait, arrêtes de poser des questions. Elle sait qu’il aime bien poser des questions, qu’il arrive à en débiter un nombre incroyable en un temps record quand il s’y met. Mais… PAS MAINTENANT ! En plus, elle n’a pas envie de répondre à ce qu’elle a fait parce qu’Ash n’en est pas très fière. Et elle est loin d’imaginer les conséquences que cela peut avoir, ne serait-ce qu’en terme de perte. Ashlynn n’avait pas réfléchit, elle s’était seulement focalisée sur le fait de devoir faire sortir Liam d’ici, tout le reste avait perdu de son intérêt. Cette erreur saura lui revenir à la figure. En attendant, la seule explication qu’elle lui donne c’est le fait de devoir partir. Maintenant.

C’est elle qui se fige. « Quoi ? » C’est quoi cette histoire avec son père ? Il a fait quoi au juste et, surtout, il a dû négocier quoi pour que son père soit en sécurité ? Ashlynn en vient à se dire que la contrepartie c’est ce combat dans l’arène. « Pourquoi tu as fait ça ?! » Il y a un ton de reproche parce qu’elle refuse qu’il ait fait ça pour elle. Il n’avait pas le droit. C’est sur son crâne qu’elle lui aurait bien filé un coup pour lui remettre les idées en place mais, avant de pouvoir faire quoique ce soit, c’est Liam qui vient la forcer à se baisser pour éviter une balle perdue. L’avantage c’est qu’ils se reconcentrent assez vite sur l’essentiel : fuir. Elle l’égueulera plus tard pour cette décision stupide qu’il a prise.

C’est Liam qui reprend les devants en l’entrainant avec elle pour sortir de la grange. Ashlynn court mais elle a aussi l’impression que son cœur va exploser à chaque coup de feu qu’elle entend. C’était pourtant logique qu’en appelant les militaires ça se finisse de cette façon, elle n’y avait juste pas pensé. Elle ne voulait pas de blessé ou de morts, elle demandait une simple diversion. Sa main de libre vient se plaquer sur une de ses oreilles pour estomper ces sons qui sont déjà en train de la faire culpabiliser. Liam s’arrête pour lui dire de partir devant parce qu’il doit aller aider un militaire en mauvaise posture. Elle devrait lui hurler de ne pas y aller, de continuer de fuir parce qu’ils n’auront pas d’autres chances. Aucune protestation ne se fait entendre. En fait, elle a envie qu’il y aille parce que personne ne mérite de mourir. Ses pensées sont contradictoires parce qu’elle ne veut pas non plus que Liam fasse ce combat dans trois jours. Une partie d’elle se dit que ça vaut quelques sacrifices, que ces militaires ont choisi ce boulot. L’autre partie d’elle s’indigne de ce genre de pensées.

La seule certitude qu’elle est, le seul point sur lequel l’ensemble de son cerveau est en accord, c’est sur le fait qu’elle ne quittera pas cet endroit sans lui. Ashlynn ne l’écoute pas et ne part pas devant. Ses genoux tombent sur le sol, ses mains prennent appuis sur l’herbe fraiche et elle incante. Habituellement, son rôle est de venir en aide aux loups. Cette fois-ci, c’est l’inverse. Ashlynn fait en sorte d’affaiblir celui qui s’en prend au militaire pour donner plus de chances à Liam. Il sera facile d’avoir le dessus sur ce loup, la contrepartie se trouve dans le fait qu’elle ne peut plus faire attention à son environnement proche.

« Arrêtez ça tout de suite ! » C’est à elle que s’adresse l’ordre mais elle ne l’entend pas et le militaire croit qu’elle aide les loups. La seule raison pour laquelle il ne lui a pas tiré dessus c’est parce qu’elle ressemble à une gamine. Ce qu’elle est vraiment à ses yeux en fait. Mais elle n’écoute pas, elle n’arrête pas. C’est la froideur du canon d’une arme qui la fige. « J’ai dit : arrêtez-ça ! » Pas vraiment suicidaire elle lève les mains quand il refuse de la croire alors qu’elle a essayé de lui expliquer qu’elle essayait de les aider. C’est son bras qu’il attrape pour la relever un peu brusquement. Ashlynn ferme les yeux et se concentre avant de hurler à l’attention du militaire : « Derrière vous. » Il se retourne tout en la tenant pour voir un loup courir dans sa direction. La seule chose intelligente qu’il trouve à faire c’est de mettre Ashlynn devant lui et de la braquer plus vivement. « N’approchez pas où je la tue. » ça l’emmerde d’avoir à tuer une gamine mais l’instinct de survie est plus fort que ses principes.

C’est mentalement qu’elle prononce des formules pour que loup qui est venu pour l’aider se retrouve faiblard sur le sol. Le militaire trouve que c’est plutôt pratique et voit dans tout cela une porte de sortie. « Ok. Tu viens avec moi. » Et il n’écoute aucune de ses protestations, ne fait même pas attention quand elle essaie de se dégager. Elle ne veut pas le suivre, elle ne veut pas partir. Pas sans Liam.

Maintenant ou jamais

De simples protestations, elle passe à des hurlements en se débattant si fort que le militaire la soulève pour l’emporter. Ses pieds ne touchent plus le sol pourtant, malgré l’inutilité de l’action, elle continue de les faire bouger comme pour courir. Ashlynn n’entend même pas le militaire qui lui demande de se calmer et qui menace de l’assommer si elle continue. Elle ne voit rien d’autre que Liam qui vient de se faire renverser par un loup, c’est la seule chose qu’elle retient, la seule qui lui sert le ventre et la fait s’époumoner assez fort pour menacer de se rompre la cage thoracique. Tout ça c’était pour lui, pour qu’il évite le combat et qu’il parte de cette meute. Ashlynn n’a eu que cet objectif en tête quand elle a élaboré son plan à la va-vite sans réfléchir à toutes les conséquences, alors à quoi ça sert si c’est pour qu’il se retrouve sous les griffes d’un loup en colère ?

Elle hurle de peur, de frustration et à l’injustice de la situation. D’inquiétude aussi quand Liam et le loup sortent de son champ de vision et que son esprit peut imaginer toutes sortes de finalité. Ça ne devait pas se passer de cette manière, ce n’était peut-être pas parfait mais bien plus joyeux dans son esprit. Dans tous les scénarios, ils partaient tous les deux ensembles. Les hurlements se transforment en pleures quand elle songe au pire, quand elle imagine un loup trop vexé de s’être fait arrêter par le petit nouveau. Elle se raccroche aussi au fait que Liam a pu s’en sortir, il s’en sort toujours. Il est débrouillard, il survit très bien et c’est sûrement le type le plus intelligent qu’elle ait pu croiser. Non, ça ne peut pas se finir comme ça.

Elle finit par se débattre avec l’énergie du désespoir, à se tortiller dans tous les sens pour espérer pouvoir voir Liam, à griffer le militaire qui vient d’arriver au bout de sa patience. Ashlynn sent ses pieds retrouver le sol et une main la libérer, alors elle y croit. Elle essaie de fuir sans prendre garde que l’homme vient de se saisir de son arme avec l’idée de lui mettre un coup assez fort sur le crâne pour qu’elle arrête de bouger et de crier. L’arme se lève et, sans qu’elle ne comprenne pourquoi, ni comment, c’est à terre qu’elle se retrouve avec le militaire. Les mains accrochées dans le sol, Ashlynn se dégage du militaire, rampe un peu plus loin et commence à se relever avec l’envie de courir vers la dernière position de Liam. Elle ne sait pas pourquoi ils sont tombés au sol, mais ça n’a pas d’importance. La seule chose qui l’est c’est le jeune loup.

À peine debout, prête à s’élancer, c’est un grognement qui la coupe dans son élan et qui lui fait tourner la tête vers l’humain. Elle ne savait même pas qu’il était possible d’avoir l’impression que son cœur lâche de soulagement, que la joie de le voir pourrait la tuer de bonheur en une fraction de seconde. Son corps l’abandonne, ses jambes surtout. C’est à genoux qu’elle retombe sur le sol alors que le militaire se décide à prendre la fuite, bien trop content d’avoir cette opportunité. Les larmes qu’elle avait laissées coulé par peur en imaginant le pire se transforment en un soulagement qu’elle ne pensait même pas pouvoir être aussi intense. Ce sont ses bras qu’elle vient mettre autour du cou du loup, son nez qu’elle laisse s’enfouir un instant dans son pelage alors que son rythme cardiaque retrouve un semblant de normalité.

Ashlynn finit par le relâcher et retrouver un peu ses capacités de réflexions. « Faut qu’on trouve un autre militaire. » Oui, ça peut paraitre un peu fou, mais c’est sa faute s’ils sont tous dans cette situation. Ashlynn n’est pas certaine d’être capable de vivre avec cela. « Qu’on le force à utiliser sa radio pour dire aux autres qu’il faut un repli général, que c’est un piège et qu’ils reviendront avec des renforts. » L’idée c’est de faire dégager tous les militaires de cet endroit, de leur faire croire que c’est un ordre qui vient de plus haut ou quelque chose dans le genre. Ils se prépareront mieux pour revenir en force, mais logiquement le Joker et l’alpha ne sont pas assez stupides pour se contenter de les attendre et de risquer de perdre un grand nombre de loups. En attendant que les militaires se préparent à une meilleure attaque, le Joker bougera peut-être pour ne plus être là quand ils reviendront.

« J’ai besoin de toi pour ça. » Et pour tellement d’autres choses encore, bien plus qu’elle ne peut l’imaginer. Mais dans l’immédiat, c’est de ses sens dont elle a besoin et de sa force de persuasion. Ashlynn n’est pas impressionnante, personne ne l’écoutera. En revanche, un loup qui montre les crocs, ça donne déjà moins envie de jouer au plus malin. Alors elle se relève, attend un signe d’acquiescement ou l’inverse avant de se mettre en route.

Maintenant ou jamais

Elle expose son idée à voix haute et si avec un autre loup elle aurait déjà détourné le regard à la recherche d’une direction à prendre, là, elle ne le fait pas. Ses yeux restent accrochés au loup attendant une réponse qui ne tarde pas à venir. Ashlynn lui sourit doucement, de façon encourageante et sans la moindre trace de moquerie ou d’impatience pour cette incapacité à communiquer par télépathie. Qu’ils apprennent déjà à se comprendre mutuellement, homme et loup, le reste viendra en son temps. La chamane se relève, passe un court instant sa main dans le pelage du loup au niveau de son cou, et s’avance.

Incapable de savoir où elle va et la direction qu’il convient de suivre, Ashlynn suit celles données par le loup. Un coup de museau par-ci ou par-là et elle change sa trajectoire, le reste du temps, la sorcière se contente de filer tout droit. Elle essaie quand même de faire attention aux bruits de ses pas, surtout quand l’endroit est plein d’autres loups qui n’auront pas spécialement envie de les voir s’éloigner. Concentrée, elle ne voit pas le loup de Liam se stopper. C’est un regard interrogateur qu’elle lui porte quand, après un grognement, il vient lui barrer la route. Par réflexe, elle lève les yeux sur l’endroit qu’ils doivent éviter, bien évidemment, elle ne voit rien. Ça ne lui vient pas à l’esprit de douter des sens du loup alors, elle hoche la tête et s’avancer dans le sens opposé.

Il détecte la présence d’un militaire bien avant elle, alors Ashlynn se fait plus prudent en avançant jusqu’à le voir. L’homme est déjà au sol, cherchant une cible sur laquelle tirer et rappelant la culpabilité d’Ashlynn dans toute cette histoire. C’est sa faute. Uniquement la sienne. Elle doit juguler les dégâts autant qu’elle le peut et c’est avec cette volonté qu’elle s’approche à son tour, bien plus près qu’elle n’aurait osé le faire si le loup n’était pas là. S’il n’était pas en train de maitriser le militaire qui n’ose pas trop bouger pour le moment. Elle inspire pour se donner le courage nécessaire et vient pencher sa tête au-dessus de l’humaine.

« Vous allez devoir prévenir les vôtres que tout cela n’est qu’un piège. Les loups vous attendaient et vous n’allez pas vous en sortir. Sonnez la retraite, revenez mieux organisez et avec plus de renforts. » Il y a un ‘s’il vous plait’ qui menace de sortir d’entre les lèvres d’Ashlynn mais qu’elle s’efforce de garder pour elle. D’ailleurs, peut-être qu’elle aurait été plus crédible en le tutoyant et avec un timbre de voix plus menaçant. « Pour qu’ils soient partis quand on reviendra, pas moy… » Il n’a pas le temps de finir sa phrase que le loup de Liam lui faire comprendre que ce n’est pas la bonne réponse. « Ok. Ok. » Qu’il panique avant de lever légèrement une main. « Je dois juste attraper mon communicateur. Là. » Il désigne doucement l’arrière de sa ceinture et s’y aventure tout aussi lentement, ne se risquant pas à faire le moindre geste brusque.

Bon, ils ne s’en sortent pas si mal tous les deux. Elle retient un sourire satisfait et un soupir de soulagement. Ça ferait mauvais genre. Les choses semblent se goupiller parfaitement, sans le moindre accroc. C’est ce qu’elle se dit quand, à la faible lueur de la lune, c’est une lame qu’elle voit briller et que le militaire sort de l’endroit où ne se trouve pas du tout son communicateur. Dans un réflexe, par peur pour le loup, Ashlynn ne réfléchit pas trop et vient brutalement écraser son pied sur le poignet de l’homme. Elle ne se rend compte de son acte que quand celui-ci lâche un cri de douleur. « Oh mon Dieu, je suis désolée. Désolée. » Elle ne voulait pas lui faire mal, seulement lui éviter de faire une connerie. Mais elle se rend aussi bien vite compte de la connerie qui sort de sa bouche. « Enfin non, je ne suis pas désolée. Pas du tout. » Elle n’est même pas crédible dans cette voix qu’elle veut plus rude et détachée. Elle soupire, incapable d’être douée dans le rôle de la méchante qui menace. « Écoutez, on essaie seulement de vous aider. Vous allez réellement y laisser tous vos hommes si vous ne leur dites pas de partir. Vous n’êtes pas assez. S’il vous plait… »

Ce n’est pas sa plaidoirie qui arrive à le convaincre, celle du loup est bien plus efficace. L’homme fini par s’exécuter, à contre-cœur. C’est aux autres qu’il impose à retrait immédiat. Elle ne connait rien au langage militaire, elle ne sait même pas s’il a laissé filer un message secret dans ses paroles. Alors c’est sur le loup qu’elle pose le regard, qu’elle lui demande muettement de se concentrer sur les alentours pour écouter et comprendre si les militaires se mettent sur le départ ou non.