Une absence remarquée

Une absence remarquée

Elijah & Nikolaj

« Je ne redescends pas même après être arrivé au manoir, ne remarque même pas que quelque chose ne va pas avec Elijah depuis que nous avons mis les pieds ici. Je devrais pourtant le vivre comme une victoire, non ? Je viens d’empoisonner la sœur jumelle d’Alex Blackwood et sans le sang d’un alpha elle perdra la vie dans les heures à venir. Pourtant je n’arrive pas à le vivre comme une victoire, trop concentré sur la suite, sur les dérapages possibles et sur les représailles. Qu’est-ce que je viens de faire ? Une part de moi commence presque à regretter la morsure de cette vampire mais mon loup se révolte de cette culpabilité, tente de mon convaincre que j’ai agi exactement comme il le fallait. Les vampires sont les ennemis, ils ne méritent pas de vivre, il ne doit pas y avoir d’exception, encore moins si c’est une Blackwood.

Retourner là-bas, c’est ce qui me semble le plus judicieux à faire. C’est Alex lui-même que je veux atteindre, lui ou son bras droit, tant que ça peut me permettre de déstabiliser le Nord, d’empêcher des représailles d’avoir lieu. Elijah m’invite à y retourner, à profiter de la pleine lune pour faire le plus de dégâts possibles, pourtant le ton désapprouve totalement cette idée. Mon frère a raison, la pleine lune ne durera pas toute la vie et c’est à ce moment-là que la roue va finir par tourner. Alors que suis-je censé faire de plus ? Que dois-je faire pour protéger ma famille et ma meute ? Je fais des allers retours sous le regard d’Elijah tel un lion en cage, réfléchissant à tout ce qu’il me dit. « Je ne peux pas prendre le risque de me mettre les humains à dos… mais je dois prévoir des représailles des vampires. » Je dois être prêt lorsqu’ils viendront venger April, car Alex ne laissera jamais passer un tel affront. Je répliquerai aussi si j’étais à sa place.

C’est le grondement mécontent d’un loup qu’on entend s’échapper de ma gorge, lui aussi semble détester ce danger, cette impasse dans laquelle je viens moi-même de nous piéger. Elijah m’invite une fois de plus à retourner au combat si c’est ce que je crois être la meilleure chose à faire, mais ce sera sans lui. C’est lorsqu’il prononce ces derniers mots que je redresse mon regard vers lui et me calme d’un coup, comme s’ils avaient été un électrochoc. « Je suis désolé, ce n’est pas mon intention de me servir de toi comme d’une arme. » Pourtant c’est ce que j’ai voulu faire ce soir. C’est aussi ce que j’ai voulu faire lors de la guerre. C’est un soupire un peu las qui finit par quitter mes lèvres alors que je glisse une main dans mes cheveux, les tirant en arrière dans un geste un peu désespéré. « Je ne sais pas ce que je fais Elijah, je ne sais plus ce que je suis censé faire depuis que nous avons perdu la guerre. » Je n’arrête pas de me dire que si Lucian avait été encore vivant les choses ne se seraient jamais terminées de cette façon, notre père aurait remporté la guerre et les vampires ne seraient plus un problème dans le Nord, probablement même dans tout Londres. J’ai une femme et deux enfants à protéger et je ne suis même pas capable d’être aussi efficace que Lucian, lui n’aurait jamais laissé sa famille courir le moindre risque.

C’est contre le mur derrière moi que je m’adosse, celui dans lequel il y a désormais un trou. Je me laisse glisser le long du mur, finissant par m’asseoir à même le sol alors que mon esprit continue de cogiter sans pour autant trouver la moindre solution. « Tout va de travers depuis qu’il est mort. » C’est de Lucian dont je parle. Je ne dis pas que ma vie a dérapé depuis sa mort, j’ai après tout trouvé Jodie avec qui j’élève aujourd’hui deux merveilleuses filles, mais c’est de mon statut d’alpha dont je veux parler. Aucun de nous n’est parvenu à être à la hauteur de notre père, Elijah. « Et je ne supporte plus ces échecs. » La prise de pouvoir d’Alex Blackwood sur le Nord, les menaces envers Jodie, les tortures de Daniel, les meurtres de loups, puis finalement la défaite de la guerre... Ça a été la goutte d’eau de trop. Etre alpha est loin d’être aussi simple que je l’avais imaginé.

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